Qu'est ce qui fait Art en campagne ?

Samedi 30 juin 2024 une table ronde, animée par Louise, Léon et Matéo du Collectif La Peyrigne, s’est déroulée au local investi par les artistes depuis septembre 2023. Ils ont accueilli visiteurs et bénévoles-médiateurs de Chemins d’Art en Armagnac.

Lieu d’exposition, d’histoire et de mémoire, le musée de  l’Armagnac de Condom s’imposait pour accueillir le débat sur le thème « Qu’est ce qui fait ART à la campagne ? »

Louise Pereira-Guerra débute par un court rappel de leurs animations des mercredis après midi, la mise en place d’une bibliothèque participative et de tables rondes avec le public transformant ainsi les deux salles et la cour du musée en lieu de partage. En juin 2024, l’installation des œuvres réalisées avec les scolaires de l’école Jules Ferry y trouvait tout naturellement sa place ainsi que les ateliers fabrication de fusain et de papier permettant aux visiteurs, petits et grands, de dessiner et de compléter l’accrochage au musée.

Cette décision d’exposer sur ce site exclusivement les dessins du public et des scolaires, sans œuvre issue du collectif ou des artistes invités, leur attribuant ainsi le statut d’« artiste exposé », résultait du vécu du Collectif face au devenir des œuvres laissées sur place depuis septembre autant travaillées par le temps que par des manipulations humaines.

Les classes de l'école Jules Ferry qui ont participé à des ateliers menés par le collectif La Peyrigne pendant l'année scolaire se sont déplacés sur le site pour découvrir comment les artistes avaient mis en scène leurs travaux collectifs.

En effet, Léon Biasiolo explique que, suite à l’accueil et aux retours de leur exposition automnale de préfiguration, délibérément provocatrice avec des artistes aux réalisations « extrêmes » et absence voulue de médiation, ils décident alors d’orienter différemment leur démarche pour l’édition de juin.

Bien que s’appuyant toujours sur le travail de G.F Baruchello et la pratique du glanage de leur  collectif La Peyrigne, les artistes reconnaissent avoir nourri leur réflexion de la confrontation avec les institutions, l’association Chemins d’Art en Armagnac et le public rencontré.

La collaboration avec CAA pour la médiation et le dépassement d’un possible fossé générationnel ont permis un enrichissement mutuel et les artistes ont apprécié l’enthousiasme des bénévoles pour s’approprier leurs œuvres et tenter de restituer aux visiteurs leur démarche par la médiation sans pour autant qu’eux mêmes se sentent dépossédés de leur travail. En plus de l’aventure artistique, c’est une formidable expérience humaine des deux côtés.

L’Art à la campagne s’est ainsi confronté à des sites et des résidents qui n’étaient pas uniquement en rapport avec le monde agricole mais représentatifs de la population et de son histoire sur notre territoire. Certains visiteurs ont exprimé le fait que la culture était dans leur champ (au sens propre et figuré) , pas dans des lieux d’exposition sans avoir besoin du regard des artistes sur leur environnement.

L’Art qu’il soit à la campagne ou ailleurs n’était-il pas là pour apporter un regard différent et rendre visible l’invisible comme certains intervenants l’ont exprimé ?

D’autres ont insisté sur le faire ensemble et  l’esprit de solidarité des habitants mais aussi des nombreux artistes qui se sont succédés en résidence pour produire un impressionnant travail de production artistique que tous ont reconnu comme cohérent et d’une grande richesse. Chacun a pu trouver dans les nombreuses œuvres proposées sur les sites de quoi alimenter ses émotions et sa réflexion.

Le nombre important d’artistes invités par le Collectif a cependant interrogé les limites d’une exposition de si grande envergure face à un financement limité aux seules subventions et aux dotations des sponsors locaux dont CAA dispose. On peut regretter ainsi, avec  les  artistes, que chacun d’eux n’ait pu recevoir une rémunération financière à la hauteur de son travail artistique mais n’est ce pas le rôle du commissariat de prendre en compte son budget global ? On touche ainsi du doigt l’éternel rapport de l’Art et l’argent, question que nous avions soulevée lors d’un Art-café et que nous pourrions revisiter.

Cependant, chacun a reconnu que la bonne volonté, les ressources humaines locales et les aides administratives fournies par CAA  et sa notoriété ont permis de compléter le soutien au grand nombre d’artistes sollicités et que toute manifestation artistique déclenche une réflexion globale et donc politique.

Se projetant dans l’avenir, ce travail sur le terrain a motivé Matéo Guilbaut à poursuivre sa formation universitaire, pour Léon à s’orienter plus particulièrement vers le commissariat mais Louise dit encore réfléchir.

 

CAA  les remercie tous les trois  chaleureusement et sincèrement ainsi que tous les artistes invités pour le chemin parcouru ensemble depuis septembre 2023, chacun ayant appris des autres lors de cette expérience inédite et qui devrait  pouvoir se poursuivre avec des collaborations ponctuelles.

 

Résultat des échanges durant ce moment de partage
La presse en parle :

LA DEPECHE  L’art en campagne s’invite au débat

Publié le 03/07/2024 à 05:14

Samedi au 2 rue Jules Ferry, un des quatre sites d’exposition des Chemins d’art en Armagnac, artistes et bénévoles avaient donné rendez-vous au public pour un nouvel événement autour d’une table ronde autour de la question « Qu’est ce qui fait l’art en campagne ? ». Dans les dépendances du palais épiscopal, le collectif de la Peyrigne en collaboration avec les Chemins d’art a accueilli au fil de l’année scolaire des ateliers avec les élèves de l’école Jules Ferry déconnectés de l’art artistique pour aboutir à la question de la place des artistes avec les enfants de la campagne. Des tables rondes pour dialoguer et ouvertes à tous sur la communication, la méditation, et le collectif ont éveillé de la curiosité. Un lieu pour discuter et faire ensemble, une belle continuité avec les autres lieux d’exposition campagnards pour les mettre en lumière et les partager. À la question posée, les artistes qui suscitent l’envie et la curiosité ne trouvent pas de réponse. Léon évoque : « Une mentalité que j’ai souhaité chérir ». Pour être en connexion avec le paysage local, les artistes doivent se remettre en question.

Faire de l’art en campagne c’est accepter la vérité et l’échange vivant avec le public des champs qui fait vivre la campagne et mérite un art en rapport avec son histoire, ses traditions, son cadre. Le collectif a regardé, proposé une mentalité avec le glanage, a trouvé beaucoup de soutien, de respect, d’accompagnement qui donnent envie de faire davantage pour le public si encourageant. Tisser des liens et des amitiés ensemble, dialoguer, c’est aussi faire de l’art en campagne.

Pour terminer joyeusement cette édition « Soupe de cailloux », un dernier événement avec un concert immersif de glanage vernaculaire produit par des étudiants des Beaux-Arts de Paris éveillera nos sensations samedi 6 juillet de 16 heures à 20 heures sous le cloître.